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L’aliment est l’intrant principal de tout système aquaponique. Beaucoup pensent pouvoir le produire eux même. Nous allons tacher de couper court au mythe…
Comment produire son aliment en aquaponie ?
Il est possible de produire soi-même un aliment pressé (simple à fabriquer) avec une presse de 3000 € à 5000 € suivant la taille souhaitée.
Cependant on ne le recommande absolument pas pour plusieurs raisons :
∙ Tout d’abord, cela nécessite une grande expertise quant aux besoins des poissons de votre élevage, aussi bien en termes zootechniques que biochimiques. Il faut travailler avec un formulateur qui connaît l’espèce et saura adapter l’aliment en fonction des stades de croissance, des besoins de l’espèce, du circuit, etc.
∙ Il est compliqué de maintenir une formule avec une qualité constante : gros problème au niveau de l’approvisionnement des matières premières ! C’est le défi des fabricants d’aliments : avoir des matières premières de qualité à un prix concurrentiel, et un approvisionnement stable en quantité et qualité sur l’année. Le « sourcing » des matières premières doit donc généralement être sous-traité ! De plus, il faut s’assurer d’une très haute qualité sanitaire et des protocoles HACCP sur les matières premières, les fournisseurs et leur stockage. Il faut également veiller à obtenir une certification de l’aliment s’il est distribué à des poissons à destination de la consommation humaine. On ne peut pas faire ce qu’on veut et il ne faut pas jouer sur ce point !
∙ Un aliment pressé est forcément coulant : pas adapté pour les sandres, ni les truites, ni pour les jeunes stades sur les carpes (nécessitant des aliments flottants ou semi-coulants), de plus un aliment pressé non consommé se fragmente en quelques minutes au fond du bassin et devient non-assimilable par les poissons, et cela va polluer très fortement votre eau ! Attention à votre circuit fermé, n’utilisez un aliment pressé qu’en faible proportion pour éviter tout risque de pollution fatale pour vos bactéries ou vos poissons (on ne parle même pas des aliments frais ou vivants, à proscrire dans un circuit fermé au vu des risques sanitaires qu’ils peuvent représenter, il faut les utiliser uniquement sur des lots de géniteurs en faible densité sur un circuit semi-fermé voir ouvert)
Pourquoi opter pour un aliment industriel ?
A l’inverse un granulé extrudé, réalisé avec une ligne d’extrusion a une durée de vie de 24h dans l’eau donc le poisson a plus de temps pour s’alimenter. L’aliment est très stable dans l’eau, sa flottabilité peut être adaptée sur-mesure, il peut être coloré ou non, peu friable, contient des appétants, et pollue nettement moins l’eau car il est plus digeste.
Ainsi, contrairement à ce que l’on peut croire, un aliment industriel polluera nettement moins votre système car il a été spécialement formulé pour garder son intégrité structurelle, il apportera un meilleur rendement en termes de prise de masse et favorisera le bien-être du poisson car il est formulé en fonction de son espèce et son stade de croissance.
Ces aliments sont faits par des professionnels qui travaillent dessus depuis des années et font en sorte qu’il y ait les nutriments nécessaires à la croissance et la bonne santé des poissons, dans les bonnes proportions et en quantité suffisante. Tout en répondant aux contraintes sanitaires pour sa formulation et pour votre élevage.
Il existe différentes tailles (granulométrie) d’aliments formulés, en fonction du stade de croissance. De plus, un aliment extrudé peut être flottant, coulant, semi coulant, semi flottant en fonction des espèces de poisson et de leurs habitudes alimentaires.
Par ailleurs, une alimentation à base d’aliment pressé uniquement (ou pire d’aliments frais !) apporte une satiété rapide au poisson, le risque étant alors une sédimentation importante au fond du bassin de matière en décomposition. Ceci représente alors un substrat idéal pour le développement de pathogènes et détériore considérablement la qualité de votre eau.
Utiliser des aliments formulés pour les circuits fermés
Il existe une différence majeure entre un aliment formulé spécialement pour un circuit fermé et un aliment formulé pour circuit ouvert :
Un circuit ouvert est connecté par exemple à un cours d’eau (détournement d’une rivière, qui passe dans les bassins et ressort en aval de la pisciculture).
Dans ce type de circuit, il est important d’avoir un aliment permettant de diluer les fécès (aliment avec dispersant = molécule de synthèse) pour éviter de dépasser les normes de rejets en sortie de pisciculture. Des adjuvants sont ainsi ajoutés dans les granulés pour disperser les fécès au maximum dans l’eau.
Dans un circuit fermé, l’eau est recirculée en permanence et il est impératif de donner un aliment avec agglomérant (= produit naturel) pour pouvoir récupérer les fécès facilement et les évincer du système efficacement. C’est ce type d’aliment qu’il faut utiliser en aquaponie. Certains fournisseurs sont en mesure de fournir ces aliments car de plus en plus de pisciculteurs se tournent vers les circuits fermés, il existe même des aliments adaptés pour l’aquaponie chez de grands fabricants français (Le Gouessant par exemple).
Les progrès de l’aliment industriel
De gros progrès ont été faits notamment dans la composition des aliments piscicoles, avec à l’origine de fortes proportions en farines et huiles de poissons. Dans les années 90, plus de 70% de l’aliment provenait d’huiles et farines de poissons contre moins de 30% aujourd’hui pour les aliments destinés aux poissons à forts besoins protéiques.
De nombreux programmes européens visent à formuler un aliment sans farine ni huile de poisson (FISH FREE FEED challenge).
Les insectes constituent une piste intéressante, mais il est interdit en France par exemple de donner des insectes non transformés préalablement (farine, déshydratation, etc), et seules 7 espèces sont autorisées Attention les aliments avec des PAT (protéines animales transformées) dont fait partie l’insecte, ne sont pas acceptés par les cahiers des charges de la GMS ! La réglementation devrait évoluer vers une tolérance pour l’insecte prochainement et en faire une exception à la règle.
Par ailleurs, la chitine présente dans la carapace des insectes est extrêmement dure à digérer pour le tractus digestif des poissons. Un autre problème réside dans le fait que les insectes ne contiennent pas d’oméga 3 qui doivent donc être ajoutés à l’alimentation des poissons car ils ne les synthétisent pas eux même. Certains phytoplanctons en sont riches, mais l’extraction des oméga 3 est un processus coûteux.
De rares ingrédients peuvent compenser farine et huiles de poissons dont les huiles extraites d’algues.
Ces aliments alternatifs doivent plutôt être considérés comme des alicaments, complémentaires aux autres, car ils peuvent entrainer des carences à terme, et leur prix est nettement supérieur à un aliment standard.
Pour toutes ces raisons, il est vivement recommandé de travailler avec des aliments formulés par des professionnels. Ils représentent en effet un coût non négligeable dans une exploitation, en assure sa performance et sont la garantie d’un équilibre alimentaire constant au sein de l’élevage. D’autant plus sur une ferme aquaponique dont l’aliment est l’intrant principal et le carburant de tout le processus !
Pour satisfaire votre soif de connaissances :